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En faisant le trajet, en voiture et dans les deux sens, entre les villes de Longueau en France et Nałęczów, à l’est de la Pologne (qui ont la particularité d’être jumelées l’une à l’autre et d’entretenir activement cette association), nous avons voulu observé et décrire l’évolution d’un territoire, l’Europe centrale, selon les règles édificatrices de la modernité - et de son corollaire idéologique, le modernisme -, et les conséquences de cette évolution sur l’environnement, l’architecture, les interactions sociales...

 

Coincés que sont les populations de cette partie du continent entre la nostalgie d’un passé forcément héroïque, les aspirations à une vie répondant aux canons les plus sophistiqués du capitalisme et l’angoisse existentielle qui est devenue l’expérience commune de l’humanité, nous avons tenté, avec nos images, d’exhumer les signaux forts et faibles qui instituent et mobilisent les formes que prend la vie des humains en Allemagne, en Pologne, en République Tchèque...

 

Dans ces pays que l’Histoire n’a pas épargné, nous avons voulu montrer ce que deviennent inévitablement les tragédies ici-bas : du présent avec des gens dedans qui font comme ils peuvent.

 

Irwin Leullier & Mickaël Titrent

Cette exposition est le fruit d’un voyage de trois semaines, à l’été 2022, qu’ont rendu possible une résidence au Trait d’Union - scène culturelle Longueau-Glisy (dans le cadre des Rencontres Photographiques) et le soutien du Conseil Régional des Hauts-de-France et d’Amiens Métropole.

Alors qu’elle est déjà âgée de 67 ans, la photographe polonaise Zofia Rydet entreprend à partir de 1978 de constituer son « Répertoire sociologique » (Zapis socjologiczny), un projet monumental qu’elle poursuit jusqu’à la veille de sa mort en 1997. Son «Répertoire sociologique », qui regroupe quelque 20 000 photographies réalisées dans plus d’une centaine d’agglomérations polonaises, m’habite depuis plusieurs années.

Comme elle, j'ai voulu questionner les liens aux liens qui unissent les gens aux objets et surtout à l’architecture, à la façon dont les préférences esthétiques individuelles, les opinions politiques et les croyances religieuses se manifestent à travers l’agencement de l’espace privé dans l’espace public. « La maison [...] est un reflet de la société, de la civilisation et de la culture, dont elle est issue ; tout comme il n’y a pas deux personnes identiques, il n’y a pas deux habitations semblables », avait-elle coutume d’expliquer.

J’entends le terme « répertoire » au sens de méthode échappant aux règles de l’inventaire scientifique. Comme je l’ai fait sur le territoire de Longueau-Glisy, j’ai envisagé ce projet dans un croisement entre la photographie documentaire et la mise en scène. À travers cette série envisagée comme une suite, c’est la modernisation de plusieurs pays qui se devine, la transformation des mœurs et des conditions de vie. En portant un regard particulier sur les façons d’habiter l’espace - urbain et suburbain - et d’y aménager des formes architecturales, matérielles et visuelles, j'ai cherché à réaliser la cartographie de catégories d’habitants de l'Est. Les détails des photographies seront autant d'infimes indices qui permettent d’identifier l’environnement et la maison de chacun.

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